Kano (Nigeria) envoyée spéciale
Assis sur une place de Kano, à l'ombre d'un mur, les élèves d'une école coranique étudient. Près d'eux, dans un caniveau nauséabond, un poulet famélique cherche sa subsistance. Son aspect maladif laisse les enfants indifférents. «La grippe aviaire, on n'y croit pas, fait l'un d'eux en rigolant. Et si on peut avoir du poulet, on le mange.» Le petit Djamilou fait remarquer qu'il connaît un éleveur dont toute la volaille est tombée subitement malade. «Alors, les gens ont tué tous les poulets et les ont vendus au marché.» Cette pratique explique la baisse drastique des prix, à la grande joie des clients. «Nous, on adore le poulet, c'est un aliment important ici, et maintenant on dit de ne plus en manger ; vraiment, je ne comprends pas», s'étonne Emilie Akpaowo, qui pile du manioc devant son restaurant.
Non loin de là, un marché propose un choix de volatiles à l'oeil morne. Dans certaines cages, les vivants cohabitent avec les morts. «Nos poulets n'ont pas la grippe aviaire, s'énerve Auwalu Mohammed Garangamawa, un vendeur. Tous les ans à cette période, il y a du choléra. Ici, on pense que cette histoire, c'est un complot contre les gens du Nord.» Selon lui, aucun service vétérinaire étatique ne les a approchés. Et le système de compensation mis en place par le gouvernement ne lui inspire aucune confiance. «Le gouvernement est corrompu. Les puissants, ceux qui ont de grosses fermes, vont rafler tout l'argent, les petits éleveurs n'auront rien.»
Insouc