Los Huajes envoyée spéciale
Don Julián est un paysan de l'Etat de Guerrero, l'un des plus pauvres du Mexique. Il a un faux air de Raimu mais, sous ses manières débonnaires, ce père de sept enfants est en guerre. Depuis trois ans, il ne quitte guère sa machette et son lance-pierres qui, entre ses mains, peuvent devenir meurtriers. Son lopin de terre, il l'a confié à des journaliers pour ne pas perdre totalement sa récolte de haricots noirs et de maïs. Car don Julián a d'autres occupations. Plus politiques. Comme les autres hommes de son village, Los Huajes, à deux heures de route d'Acapulco, il monte la garde à l'entrée des lieux. Ils se relaient, à côté d'une barricade de grosses pierres, pour filtrer la circulation.
Le gouvernement mexicain a décidé de construire un immense barrage sur le fleuve Papagayo, à La Parota, pour produire de l'électricité destinée à l'opulente station balnéaire voisine. Pour le réaliser, 17 500 km2 de terres cultivables et de forêts la moitié de la Belgique vont disparaître sous les flots. Si ce projet aboutit, Los Huajes, comme dix-huit autres villages, va être englouti. Et les paysans ne le veulent pas. Alors ils sont entrés en résistance.
Depuis bientôt trois ans, ils interdisent aux ingénieurs, aux camions de matériaux et aux pelleteuses de passer. Et, malgré les gaz lacrymogènes, les intimidations ou les incarcérations, la police a jusqu'à présent échoué à mater ce mouvement de rébellion. «Ce barrage ne va nous apporter que du malheur, affir