Après quarante ans d'une liaison passionnée, Francis Hallé est toujours amoureux des arbres. Mais ce botaniste, spécialiste des forêts tropicales, qui a dirigé les missions scientifiques du Radeau des cimes sur les canopées de 1986 à 2003, est aussi un homme blessé. Blessé comme ces forêts qu'il étudie et qui disparaissent peu à peu de la surface de la Terre, sous les coups des exploitants de bois, des chercheurs d'or ou des planteurs de soja. C'est aussi un homme en colère : samedi à Paris, lors des grands Dialogues du XXIe siècle organisés par l'Unesco, il a dénoncé «le massacre sous nos yeux, et par les pays industrialisés, des dernières forêts primaires».
Quel type de forêt est menacé ?
Les forêts primaires, ces forêts jamais exploitées par l'homme. Elles n'existent plus depuis déjà au moins cinq siècles en Europe de l'Ouest. On les trouve surtout en milieu tropical mais elles disparaissent très vite. En Indonésie, c'est déjà fini. La Chine est très active dans le déboisement. Le Brésil détruit l'Amazonie pour planter du soja. En Guyane, ce sont les chercheurs d'or qui font des ravages. En Australie et en Tasmanie, les forêts d'eucalyptus s'amenuisent. Dans dix ans, ce sera fini : il n'y aura plus de forêts tropicales sur la planète.
En quoi cette disparition est-elle grave ?
Ce sont des écosystèmes prestigieux mais encore très mal connus car difficiles à étudier, des milieux spectaculaires. Ils regroupent 75 à 90 % de la diversité biologique de la planète ! Ces forêt