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Libération
Reportage

En Chine, des villes et des vies minées par le charbon

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publié le 6 décembre 2006 à 0h23

Province de Shanxi envoyée spéciale

A Haojiazhai, «même les ânes tombent dans les trous». La nuit, on entend les murs gémir et craquer. «On a peur», dit le vieil homme, balayant les éboulis de sa ruelle du bout de sa pantoufle chinoise. Il s'appelle Hao, comme le village où il tente de survivre avec ses voisins aussi vieux que lui. Hao attend de partir là où «on» lui dira d'aller. Mais les voitures ne montent jamais jusqu'à Haojiazhai. «On nous a oubliés», dit Hao. Quand il est né, on ne parlait pas encore du charbon dans la province du Shanxi. La vie dans ces montagnes peignées par les terrasses, c'était le sorgho, le maïs, le blé. Mais le Shanxi est devenu le réservoir énergétique de la Chine (1) et le sous-sol s'est transformé en passoire. Aujourd'hui, plus rien ne pousse, l'eau tombe dans les trous, comme les ânes, et il n'y a plus de bras pour pousser les charrues. Le village aux maisons troglodytes, posé sur des kilomètres de galeries désaffectées, est miné. Le charbon l'a anéanti (2).

Les mines, Li les a vues fleurir en vingt ans. Né à Haojiazhai, quand la terre nourrissait encore 100 familles, il a déménagé lorsque les premiers signes d'effondrement sont apparus, il y a une quinzaine d'années. Les autorités, moyennant finances, proposaient de reloger les habitants dans un nouveau village, bâti à la va-vite 200 mètres plus bas. Il menace de s'effondrer à son tour, rattrapé par la gangrène des mines sauvages. «Il en pousse partout, tout le