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Libération
De notre envoyé spécial

En Colombie, expulsés et tués pour des palmiers

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publié le 28 octobre 2008 à 6h51

De la pointe de ses bottes, Gabriel Anaya désigne les bris d'os épars. «J'avais une femme et un petit-fils enterrés ici.» A quelques mètres du vieux paysan colombien, le vent fait osciller les feuilles de la plantation de palmiers africains. Ces arbres, dont l'huile doit servir à l'élaboration d'agro-diesel, ont bouleversé sa vie et celle de centaines de familles du bassin du Curvaradó, une région de la jungle du Nord-Est de la Colombie. «Ils ont nettoyé notre cimetière au bulldozer, avec tout le village, pour y mettre leur plante à carburant», résume-t-il. Lui et ses voisins du hameau d'Andalucía ont été expulsés en 1997 par une offensive de l'armée et de milices narcoparamilitaires, officiellement pour chasser la guérilla. «Ils nous disaient : "Partez ou on vous coupera la tête"», raconte José Antonio Correa, aux côtés d'Anaya. Lui-même a vu son frère décapité et éviscéré ; son jeune voisin Andrés, qui avait 12 ans, a vu un autre civil «découpé vivant et mort de douleur». En quelques mois, le Curvaradó s'est vidé de ses habitants, réfugiés dans les bidonvilles de la région.

Menaces. Deux ans après, les escadrons envoyaient les premiers contremaîtres préparer les plantations, encadrés par l'armée. «J'ai moi-même trouvé des entrepreneurs pour investir dans ces projets», a expliqué un chef paramilitaire, Vicente Castaño, à l'hebdomadaire colombien Semana. Il a fallu la démobilisation officielle des miliciens, négociée ave