Les patrons de l'atelier du monde ont connu des banquets plus joyeux. Plusieurs centaines, réunis jeudi dans un hôtel six étoiles de Dongguan, lèvent leurs verres sans le moindre entrain. «On court à la catastrophe», lance Xia Chaoping, de Hongkong. Son entreprise en Chine continentale, la Ha's Brothers Metal, 1 000 employés, exporte des éléments de cuisine en Europe. En un an, les commandes ont, selon lui, chuté d'un quart. Dans le même temps, tout a augmenté : salaires, matières premières, taxes pour l'environnement… «Je ne m'en sors plus, assure le PDG. Je n'en suis pas encore à licencier, mais je ne remplace pas les ouvriers qui partent.»
«Faillite». Cui Yang An, Hongkongais, fabrique des serrures haut de gamme qu'il exporte en Europe, en Australie et aux Etats-Unis. En octobre 2007, son usine tournait comme une horloge, vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Depuis septembre, il a ralenti les cadences, faute de commandes. Ses salariés sont nerveux : «Sans heures supplémentaires, ils ne s'en sortent pas, beaucoup partent ou parlent de partir. Ils ont peur de la faillite.» Une centaine auraient déjà plié bagage, fuyant la région sinistrée pour le delta du Yangzi et ses industries de pointe.
L'atelier du monde, ses sweatshop (ateliers de la sueur) et ses vieilles usines, ne fait plus rêver la deuxième génération des mingongs, les travailleurs migrants. Tous les facteurs s'accumulent pour que le jouet, la chaussure, le mobilier,