Kindy Opoya. «Je suis née en 1986 à Talhuen, un village à environ deux heures de pirogue en amont de Maripasoula. Je suis assistante de vie scolaire. Aujourd'hui, le quotidien dans nos villages, c'est la peur des garimpeiros. La peur, jour et nuit. Ils ont envahi notre vie. Chaque jour, nous craignons de trouver notre abattis dévasté : ils pillent et emportent la canne à sucre, les dachines, les bananes… Chaque jour, nous avons peur de faire une mauvaise rencontre en forêt. La nuit, on dort mal : le bruit des pirogues à moteur nous réveille, les clandestins volent nos moteurs pour remplacer ceux que les gendarmes leur ont saisis. Beaucoup de villageois dorment armés.
«On a peur, bien sûr, mais parmi ceux qui ont peur, il y en a qui veulent se défendre. Il y a déjà eu des échanges de coups de feu. L’eau du fleuve qui passe devant notre village est sale. Sale et blanchâtre depuis plusieurs mois. Il devient gênant de laver son linge, de se laver, de laver son enfant qui va boire cette eau en se baignant. C’est à cause d’un nouveau chantier d’orpaillage, très grand, sur la crique Lipolipo. Dans nos villages, les puits et pompes mis en place par l’administration ne fournissent de l’eau potable que quelques heures par jour, le matin seulement.
«En octobre, les légionnaires sont arrivés à Twenke. Au début de leur installation, ils faisaient bien leur travail : aucune pirogue de clandestins ne passait, ils défendaient vraiment le fleuve, sans avoir peur de bo