Kamla ne veut pas parler. «J'ai survécu, maintenant je veux oublier», lâche-t-elle sur le pas de sa maisonnette en terre. Il y a trois ans, cette femme originaire d'un village de Balangir, district reculé de l'Est de l'Inde, a perdu son mari alors qu'elle était enceinte de son quatrième enfant. De quoi est-il mort, à 32 ans ? Personne ne le sait vraiment. D'épuisement, probablement. Car la vie de cette famille, comme celle de dizaines de milliers d'autres dans cette région oubliée, relevait de la survie permanente. Infesté de paludisme, régulièrement frappé par les sécheresses, longtemps hanté par des famines, Balangir, dans l'Etat d'Orissa, compte parmi les zones les plus arriérées du pays. Seulement 4% des terres du district sont irriguées, ce qui limite l'activité agricole à une récolte par an, après la mousson.
Officiellement, 62% de la population vit sous le seuil de pauvreté, établi ici à 356 roupies (moins de 6 euros) par mois. Bien plus, en réalité. De l’aveu même des autorités, le dernier recensement sur la question, en 1997, était loin d’être satisfaisant. Kamla n’a pas pu toucher les 170 euros prévus en cas de décès du chef de famille car elle n’est pas recensée comme pauvre. Totalement démunie, elle parvient tant bien que mal à nourrir ses enfants en tissant des paniers de bambou qu’elle vend au marché du bourg voisin. Son mari, lui, travaillait les champs des autres.
Briqueterie. Ici, beaucoup n'ont en effet pas de terres, ou les ont hypo