Al'occasion de la sortie du livre la Chute du ciel, parole d'un chaman yanomami rédigé par le chef indien Davi Kopenawa et l'anthropologue Bruce Albert, Libération a demandé à Raymond Depardon, photographe globe-trotter, auteur de plusieurs livres et films sur la communauté amazonienne, d'interroger les deux hommes. La rencontre a eu lieu fin juin, à la Fondation Cartier pour l'art contemporain à Paris. Les propos de Davi Kopenawa étaient traduits simultanément par Bruce Albert qui partage la vie des Yanomami depuis plus de trente ans et parle couramment leur langue.
Raymond Depardon : Pourquoi ce titre, la Chute du ciel?
Davi Kopenawa : La chute du ciel est une prophétie des chamans. L'une de leurs missions est de maintenir le ciel en place. Si les Blancs détruisent la forêt, envoient des épidémies, si les chamans meurent, alors il n'y aura plus personne pour retenir le ciel. Or le ciel est déjà malade à cause des fumées que les Blancs produisent, ces fumées qui montent dans la poitrine du ciel et commencent à l'étouffer, à le brûler. Il est très fragile. A la mort des chamans, leurs esprits orphelins, en colère, vont le découper. L'obscurité va se faire, le tonnerre, la pluie, ne vont plus cesser, et avant qu'on s'en rende compte, le ciel va s'écrouler sur nous et tout sera fini.
Bruce Albert : Il faut avoir en tête ce que vivent actuellement les Indiens d'Amazonie, alors que le Brésil s'apprête à élire un nouveau président. Raoni, le chef des Kayapos, était de passage à Paris,