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Libération

Ces paroles irradiées qui résonnent encore

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Dans les archives de «Libé», il y a huit ans. Journaliste et écrivain, Svetlana Alexievitch recueillit, durant trois ans, les témoignages de 88 victimes de Tchernobyl. En France, son livre «la Suppli-cation» fit l’objet de plusieurs adaptations au théâtre.
publié le 26 mars 2011 à 0h00

«Une pensée bizarre ne me quitte pas, me tourmente, me semble ne pas être à moi, comme si je l'avais lu quelque part : j'ai vu ce que les autres n'ont pas encore vu. Quelque chose d'horrible s'est ouvert devant nous avant les autres», dit Valentina Timofeïevna Panassevitch, femme humblement hallucinée par ce qu'elle vient de vivre, tout autant que par l'amour éperdu qu'elle porte à son mari, envoyé comme «liquidateur» à Tchernobyl et dont elle dit tendrement l'effroyable agonie. Cette «voix», la dernière de Tchernobylskaïa molitva «la prière de Tchernobyl» traduit dans l'édition française par la Supplication (1) recueillie par Svetlana Alexievitch, est sans doute celle dont elle se sent le plus proche. Son livre, fruit d'une enquête de trois ans, orchestre les voix de 88 «gens de Tchernobyl».

Depuis sa parution en 1997, la Supplication a été traduit en vingt langues. Journaliste et écrivaine, l'auteure vient de Biélorussie, pays proche de la centrale (située en Ukraine), touché par le nuage radioactif qui se propagea après la catastrophe, le 26 avril 1986. Président de l'URSS, Gorbatchev fit preuve d'un soviétisme aigu (rétention d'information, mensonges, mépris du genre humain), et Tchernobyl contribua à la chute de l'Empire.

«Confrontation». Aujourd'hui, la Biélorussie est dirigée par un certain Loukachenko, ex-chef de kolkhoze, président borné qui bafoue toute opposition et toute information. Le