La transition entre les allées fleuries de Nairobi - plantées de pelouses fraîchement tondues le long desquelles s'étendent des maisons bien cachées derrière les grillages - et le bidonville de Kawangware est brutale. Soudain, la route se tord, se cabosse, ondule, les matatus (transports collectifs) manquent d'écraser les piétons qui se précipitent sur le bas-côté gadoueux où les commerçants ont posé leurs étals de fruits et légumes, respirant l'épaisse fumée noire des pots d'échappement.
A l’entrée du bidonville où s’entassent 200 000 pauvres, un seul bâtiment en dur est visible, centre d’une activité insolite. Tout autour, des petits commerces ambulants se sont installés : une femme vend des cartes téléphoniques, un homme propose des paquets de chewing-gum et des cigarettes. Devant, des hommes taillent le bout de gras en attendant un travail journalier qui ne vient pas tandis que deux files d’attente se forment en parallèle aux deux portes du petit édifice : une pour les femmes, une autre pour les hommes. Au milieu, la caissière. Ce sont les nouvelles toilettes publiques du quartier.
Construites par l'entreprise Eco Tact et baptisées Ikotoilet, elles ont soulagé d'un fardeau bien embarrassant l'école primaire située tout à côté. «Auparavant, les gens allaient faire leurs besoins tout autour de la clôture, explique Phyllis, une institutrice. Et ça sentait jusque dans les salles de classe, un cauchemar. Maintenant, on respire mais il faudrait en installer partout.