Elle parle avec la voix atone des gens qui ont tellement souffert qu’ils n’ont pas la force de se plaindre. Amarra se rend au centre de Médecins sans frontières pour faire soigner son bébé de 5 mois, atteint de malnutrition et dont les cris apeurés ne font même plus venir de larmes. A Dadaab, le plus grand camp de réfugiés au monde accueille près de 400 000 Somaliens dans le nord-est du Kenya, une zone aride. Eau, nourriture… Tout manque. Mais la situation reste plus enviable qu’en Somalie, où la famine s’est abattue sur plusieurs régions sous le contrôle des shebab, ces insurgés islamistes qui ont revendiqué leur affiliation à Al-Qaeda. Il y a quelques jours, un porte-parole du mouvement a démenti l’existence d’une famine, accusant les Nations unies de propagande.
Enfants soldats. «Les shebab nous ont interdit de quitter le pays, raconte Amarra. J'ai dû m'enfuir pendant la nuit avec quelques familles du voisinage. Nous avons marché pendant des jours sans nourriture, en mâchant des feuilles pour tenter de nous hydrater.» Son mari tombé malade, elle était la seule à pouvoir gagner de quoi nourrir leurs quatre enfants. Mais, un jour, elle s'est faite violemment admonester. «Un shebab qui devait avoir à peine 15 ans m'a frappé en pleine rue. Il m'a conduite en prison car je ne portais pas de voile. Il disait que je ne respectais pas le véritable islam et qu'une femme n'est pas censée travailler. Amarra désigne le tissu grisâtre qui lui