Aux premiers jours de mars 2011, nous ne savions rien de Fukushima. Le 11 mars, quelques minutes suffiront pour apprendre à écrire son nom, le prononcer, le crier. La tragédie soudain s'appelait Fukushima. Scotchés à nos écrans et aux fils d'information, nous avons passé des nuits et des jours à essayer de comprendre l'enchainement de l'horreur dans la 3e plus grande puissance économique mondiale : séisme sous-marin, épicentre proche de l'archipel, tsunami monstrueux, accident nucléaire majeur, villes rayées de la carte, terres envahies, 19 000 morts et, aujourd'hui encore, près de 350 000 personnes toujours réfugiées dans des logements provisoires, soit parce que leurs maisons n'ont pas été reconstruites, soit parce que les niveaux de radiations sont trop élevés.
La mécanique de la «communication nucléaire» nous était connue, comme si dans le monde nucléaire les mêmes programmes de traitement de texte exécutent depuis quarante ans les mêmes commandes. Nous ne fûmes pas surpris. L'opérateur TEPCO, en lien avec les autorités gouvernementales, toujours forcément rassurantes, commença par dire : pas de problème. Puis les Japonais et le reste de la planète comprirent que, dans les faits, les problèmes s'enchaînaient de manière dramatique : incapacité pour l'Homme de reprendre la main sur la machine, problèmes techniques en série, cafouillages administratifs en ce qui concerne la surface du périmètre à évacuer pour les populations riveraines (l'évacuation de l'agglomération de Tok