Le palais de justice de Turin rouvre le dossier de l’amiante. Ce matin, un an jour pour jour après avoir condamné à seize ans de prison et 100 millions d’euros d’indemnités deux ex-patrons de la firme Eternit, les magistrats entament le procès en appel de cette catastrophe sanitaire. Des délégations de victimes en provenance de France, de Belgique, de Suisse et d’Allemagne, assistent à l’audience comme elles l’ont fait durant les deux années du premier procès. Car le drame de la poussière mortelle ignore les frontières : Eternit est une multinationale qui a contrôlé pendant des décennies le marché mondial de l’amiante, exposant à ses fibres cancérigènes des dizaines de milliers de salariés et d’habitants en Europe, avec les mêmes conditions de travail et les mêmes mensonges.
Contraste. Pour toutes ces familles meurtries, le jugement de février 2012 a constitué la première reconnaissance de la responsabilité pénale des industriels, et l'espoir que l'exemple italien ouvrirait une brèche pour un procès dans leur propre pays. Mais en France, un an plus tard, l'hypothèse d'une procédure pénale s'éloigne de plus en plus. Amère, l'Association nationale des victimes de l'amiante (Andeva) note un contraste saisissant : «En Italie, les empoisonneurs ont des comptes à rendre à la justice. En France, seize ans après le dépôt des premières plaintes, il n'y a toujours ni responsable ni coupable pour une catastrophe qui fait 3 000 morts par an.» Et