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Libération
Témoignage

«On n’a pas eu le choix, on a divorcé»

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Rika Ogawara, professeure de piano, 32 ans.
publié le 10 mars 2013 à 21h54

La vie de Rika Ogawara a volé en éclat au moment où la radioactivité s'éparpillait dans la nature. Cette professeure de piano de 32 ans ne se posait pourtant pas de questions avant le 11 mars 2011. Elle vivait heureuse dans la capitale de la région, Fukushima (qui signifie «île de la prospérité»), avec son mari, employé d'une compagnie d'électricité, et leur fille de deux ans, Chisé. Au printemps, cette rêveuse passait des heures en pleine nature pour admirer les «verts de la nouvelle saison, si tendres, si uniques». Elle se régalait du riz de la province, réputé parmi les meilleurs du Japon.

Deux jours après l'accident nucléaire, Rika s'est réfugiée avec sa fille et ses parents sur l'île d'Hokkaido, tout au nord. «Très vite, on a discuté de l'avenir avec mon mari. Moi, j'ai dit que je ne reviendrai jamais dans la province de Fukushima. Mon mari, lui, m'a annoncé qu'il n'en partirait pas. Nous n'avons pas eu le choix : nous avons divorcé.» Projetée dans la brutalité de ces souvenirs, la jeune femme refrène ses larmes. Aujourd'hui, ce qui lui manque le plus, c'est son insouciance. «Ma vie a basculé, du jour au lendemain, tout mon système de valeurs s'est renversé, confesse-t-elle, l'air triste. Je suis moins matérialiste qu'avant, par exemple, je pense qu'il faut se battre pour protéger la vie.»

Rika vit désormais dans la préfecture de Yamanashi, à deux heures de Tokyo. Elle a rencontré un autre homme, évacué de Fukushima lui aussi. «Il e