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portrait

Rémi Caritey, écorcé vif

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Natif des Vosges, africain de cœur, ce photographe est aussi récolteur de semences forestières à la cime des arbres.
publié le 25 juin 2013 à 20h16

Les pieds s'enfoncent dans le tapis moussu et spongieux. A l'ombre fraîche des sapins et des épicéas qui tamisent le soleil de juin, Rémi Caritey marche comme chez lui dans cette forêt vosgienne qui l'a vu naître. Son territoire, ce sont les hauteurs, les cimes : depuis trente ans, cet homme grand et mince vit plusieurs mois par an dans les arbres. Matelot des cimes, il exerce une activité singulière, méconnue et empreinte d'enfance. Il passe son temps à grimper aux arbres et, comme l'écureuil, redescend les bras pleins de graines. Un «métier à la fois poétique, engagé, et quelque peu dérisoire», écrit-il dans le Vertige des forêts.

Ils ne sont qu'une trentaine en France à être «grimpeurs récolteurs». Une moitié travaille pour l'Office national des forêts (ONF), les autres, dont Rémi Caritey, pour Vilmorin, une entreprise productrice de semences potagères et forestières depuis plus de deux siècles. Assis sur une souche, dans le silence que seuls troublent les oiseaux, il raconte ce métier né dans les années 70, lorsque l'ONF et l'Institut national de la recherche agronomique (Inra) ont entrepris d'améliorer la qualité génétique des arbres et de contrôler toute plantation dans les forêts françaises. L'ONF a découpé la France en régions de provenance, a classé les parcelles boisées en recensant les arbres les plus droits, vigoureux et sans nœuds, ceux qu'apprécient les forestiers et les scieries. C'est dans ces parcelles de choix que les grimpeurs montent réco