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Abysses en abîme

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L’Europe doit statuer d’ici à la fin de l’année sur l’interdiction du chalutage profond. Soutenue par la France, cette méthode de pêche est considérée comme une aberration écologique par les scientifiques.
publié le 26 septembre 2013 à 18h06

Au large de la Côte d'Azur, dans les profondeurs marines, une créature immensément longue, plate et argentée, émerge des abîmes. L'image est saisissante. Pour la première fois, des plongeurs ont filmé en ultrahaute définition le mythique serpent des mers, Regalecus glesne, dit régalec. Le plus long poisson osseux du monde, jusqu'à onze mètres, vit entre 20 et 1 000 mètres sous la surface, dans un monde obscur qui nous est plus étranger que la surface de la Lune : les abysses. Epoustouflante d'étrangeté, extraite d'un film qui ne sera diffusé qu'en 2015, l'image, symbole de la biodiversité des grands fonds marins, a été offerte par son auteur (1), aux scientifiques et à la coalition d'ONG qui se battent contre le chalutage en eaux profondes. Car la période est cruciale : l'Union européenne doit se prononcer sur une proposition d'élimination, dans l'Atlantique Nord-Est, de cette technique de pêche considérée par les biologistes des grands fonds comme une arme de destruction massive. Elaborée par la Commission européenne, la proposition fera l'objet d'un vote, le 3 octobre, au sein de la Commission des pêches du Parlement européen, puis en séance plénière, en décembre à Strasbourg. Deux pays défendent résolument la pêche industrielle profonde : la France et l'Espagne. Pour infléchir leur position, la communauté scientifique internationale s'est jetée dans la bataille comme rarement. Plus de 300 chercheurs ont signé une déclaration contre cette méthode de pêche qu'ils c