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Libération
Interview

«Sans coopération sur l’eau, 30 pays peuvent basculer dans la guerre»

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Présente à la COP 20 de Lima, Monique Barbut, de l’ONU, alerte sur les risques de délaisser les terres agricoles.
En Chine, en 2013. La demande d'eau va croître de 30% dans le monde d'ici à 2050. (Photo Carlos Barria. Reuters)
par Christian Losson, Envoyé spécial à Lima
publié le 11 décembre 2014 à 18h46

Monique Barbut est secrétaire exécutive de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification. Elle déplore que la COP 20 de Lima, le 20e sommet de l'ONU sur le climat qui s'achève ce vendredi, délaisse les enjeux de la terre et de l'eau. Quitte à alimenter des conflits dans le monde.

Pourquoi les enjeux de l’agriculture, de la terre et de l’eau sont évoqués davantage dans le sommet off des peuples de Lima qu’à la conférence officielle ?

Parce que ces sommets de l’ONU sont peut-être désormais trop orientés sur le business, la technologie, les énergies renouvelables et ne parlent plus assez de nos modes de vie, de notre survie, de nos paysans. La seule transition énergétique ne suffira pas à limiter le réchauffement à 2° C d’ici 2100… En 2050, la planète comptera 9,6 milliards d’habitants. Il faudra augmenter de 70% la production alimentaire, multiplier par deux le recours à l’eau ! Il faudrait 4 millions d’hectares de terres en plus par an. Comment faire si on laisse les terres productives diminuer, et si on n’agit pas face à la désertification ?

L’accès aux terres est-il un des piliers de la lutte contre le changement climatique ?

Près de 55% de la terre agricole est dégradée. De plus, les scientifiques du Giec évoquent une perte de productivité agricole de 1% tous les dix ans. Ce manque de fertilité des sols mine le droit à la nourriture. D’ici à 2050, de 10 à 20% des gens seront frappés par les famines. La malnutrition infantile augmentera de 21% de plus qu’en l’absence de changement climatique. Il faut donc commencer par restaurer les 500 millions d’hectares de terres agricoles dégradées. Ce qui permettra aussi de séquestrer l’équivalent de 11 milliards de tonnes de dioxyde de car