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Libération
Critique

Brook le sud-africain

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Avec «le Costume», il mène à Paris le théâtre des townships.
publié le 11 décembre 1999 à 2h04
(mis à jour le 11 décembre 1999 à 2h04)

L'inimitable Sotigui Kouyate lance l'histoire intitulée le Costume avec la concentration du rêveur à l'instant de jeter loin dans la rivière son ricochet. Voilà qu'à mots simples et vivaces il retrace les circonstances du drame en voie d'advenir sur scène. Ici, dans ce théâtre ombreux au fond peint de la plus belle des couleurs rouges, le filiforme Sotigui K., yeux iridescents quasi écarquillés, déploie en prologue les phrases de feu de Can Themba, qui dépeignit en poète cet endroit de Sud-Afrique où Matilda et Philemon s'aimèrent puis se désaimèrent: un morceau de ville pauvre, une township à la lisière de Johannesburg, au temps de l'apartheid, il n'y a pas si longtemps" Sans encore rien dévoiler de la tromperie furtive de Matilda, ni du pardon mal enclenché, parce que bien trop vengeur de la part du mari berné. Car c'est cela qui va se jouer. Au centre du plateau magique des Bouffes du Nord, en plein milieu de cet espace vide, s'est échoué, parallèle au public, un étroit lit recouvert d'un drap orange de coton bon marché et d'une rustique couvrante marronnasse. Un peu derrière, un cintre à roulettes. Quelques habits, quelques chapeaux, suspendus. Ici, une ou deux pauvres chaises. Là, une table de rien. Sur tout, les lumières blanches de Philippe Vialatte.

Griot ébène. Egal à lui-même, ni jamais vraiment le même, Sotigui K., acteur à la voix naïve dont Giacometti eût aimé sculpter la dégaine décharnée, ce griot ébène cher à Peter Brook depuis l'épopée du Mah