Personne n'a encore vu son «conte de fées médiéval» Je suis sang, créé spécialement pour la cour d'honneur d'Avignon (le spectacle ne sera pas joué ailleurs), et déjà les discussions alimentent les siestes estivales. On dit de l'artiste belge flamand Jan Fabre, installé à Anvers, où il est né en 1958, qu'il est un provocateur, fascisant, et que les âmes sensibles devraient s'abstenir. En attendant d'en savoir plus sur le contenu de cette création, déjà promue scandaleuse, nous avons interrogé le créateur (plasticien, performer, metteur en scène, chorégra phe, auteur) sur cette obsession du «sang» et sur la réputation sulfureuse qui pré cède son spectacle alors que l'an dernier au festival Montpellier-Danse (Libération du 24 juin 2000), il ne fut qu'un invité parmi d'autres malgré un spectacle déjà sanguinolent et gluant.
Pourquoi ce «sang» pour la cour d'honneur?
Le sang est encore visible sur les murs du palais des papes, du moins il est présent dans notre mémoire. Mais ce n'est pas uniquement lié au lieu; il s'agit d'une forme d'utopie, celle d'un corps liquide. C'est une vision prophétique à propos d'un homme-sang qui nous permettrait de ne plus vivre au Moyen Age. A ce moment-là, on serait délivré des tabous liés au sang y compris le sang menstruel, présenté en bleu dans les publicités , délivré des stigmates.
En mai dernier, vous avez fait une performance à Lyon, «Sanguis/Mantis», préparation à la création d'Avignon, expérimentation sur votre propre corps, où vous avez opéré des saignées...
Non, rien ne relie les deux. La performance et le théâtre sont des médias différents. La performance est pour moi un voyage spirituel, par lequel j'ai besoin de passer.
«Le sang», «le guerrier de la beauté»: vous maniez des concepts qui sont très complexes.
Oui, mais je crois être assez clair