Menu
Libération
Interview

Héraclès en guerre contre le terrorisme

Article réservé aux abonnés
Théâtre. Luc Bondy tire vers la comédie fantastique un texte de Crimp inspiré de Sophocle.
publié le 23 septembre 2004 à 2h15

C'est aux Trachiniennes de Sophocle que le dramaturge anglais Martin Crimp a emprunté l'intrigue de sa pièce Cruel and Tender, et c'est dans la première réplique du texte grec qu'il a puisé son titre : «On ne peut savoir, pour aucun mortel, avant qu'il soit mort, si la vie lui fut douce ou cruelle.» Rien à voir en apparence avec le début du texte de Crimp : «Il y a des femmes qui croient/que tous les hommes sont des violeurs./Je n'y crois pas.» Cruel and Tender suit pourtant d'assez près les péripéties des Trachiniennes.

Epouse d'Héraclès, Déjanire déplore l'absence du héros toujours en campagne. Jalouse, elle l'empoisonne par erreur en lui faisant parvenir une tunique qu'elle croit trempée dans un philtre d'amour, et se suicide, avant que lui-même ne meure dans les pires souffrances. Chez Crimp, Déjanire s'appelle Amelia, Hyllos, le fils, est James, tandis qu'Héraclès est rebaptisé «le Général».

Ce dernier mène en Afrique une guerre au terrorisme, qui échappe largement au contrôle des politiques (Jonathan, le ministre) et des médias (Richard, le journaliste). Amelia est entourée d'un trio féminin (gouvernante, kiné, esthéticienne). Et c'est l'arrivée dans sa maison de la jeune Laela et d'un petit garçon, réfugiés confiés à ses bons soins par le général, qui déclenche le drame.

Brutalité des situations, hypocrisie des rapports familiaux, guerre des sexes, peurs irrationnelles, la pièce de Crimp juxtapose le trivial et le tragique, et s'appuie sur une langue très rythmée. La mis