Elle a la silhouette d'une ballerine, mince, élancée, gracieuse. Est-ce pour cette raison qu'elle se retrouve sur un plateau au côté de Boris Charmatz, chorégraphe critique et expérimental ? Sûrement pas. Qu'elle ait fait de la danse ne compte pas vraiment non plus. Le dialogue entre les deux est plus philosophique, qui convoque un autre artiste disparu, Tatsumi Hijikata, un des fondateurs japonais du mouvement butô, «danse du corps obscur» (Libération du 3 novembre). Une partie de la Danseuse malade, œuvre poétique de Hijikata, traduite par le chercheur Patrick Devos, non publiée en France, participe tout autant que les corps au mouvement.
Et voilà que Jeanne Balibar se retrouve à dire un texte. Cela l'amuse : «Ce matin, sous la douche, je me disais que, de ce point de vue, c'était un vrai ratage. Je voulais ne pas parler et danser, mais je ne danse que quatre minutes à la fin du spectacle.»
Ironie. Personne ne sort indemne d'une éducation par le classique et la mémoire du corps est tyrannique. Cela ressurgit un jour comme une envie de fumer. A 5 ans, Balibar fait une dépression d'enfant. Elle se lance alors dans la danse classique, jusqu'à 17 ans, à raison de quatre heures par jour. «Le fond de l'affaire, explique-t-elle, c'est que cela correspondait à une façon de sortir de la prison dorée dans laquelle j'étais élevée, autour d'une pratique si savante et maîtrisée de la langue. Le cours de danse était un lieu