Un soir d'été 1840. Kouroslépov a peur que le ciel lui tombe sur la tête. Ivrogne tourmenté, le riche marchand passe l'essentiel de son temps à cuver sa vodka. Tombé du lit à 8 heures du soir, il est convaincu d'avoir entendu quinze coups sonner à l'horloge et envisage d'aller «se rincer le gosier» juste avant l'apocalypse. Ainsi s'ouvre Cœur ardent, tranche de vie familiale et plongée dans la province russe à la veille de l'abolition du servage. Bourgeois, paysans, domestiques, nouveaux riches, autorités militaires et civiles forment une fresque qui mêle la farce, le drame et la comédie politique, l'un des chefs-d'œuvre d'Alexandre Ostrovski (1823-1886), l'auteur de la Forêt.
Vaudeville. Sur le plateau du théâtre Gérard-Philipe de Saint-Denis, le metteur en scène Christophe Rauck dégage le terrain : pas de salon avec piano et samovar, mais une vaste aire de jeu où il fait bon courir. Il imagine un vaudeville à l'échelle de la steppe, avec des amants qui se planquent dans le bois de bouleaux plutôt que dans l'armoire.
Cœur ardent tient de la poupée russe : l'intrigue familiale (fille répudiée, belle-mère abusive) s'emboîte dans une enquête policière (qui a volé 2 000 roubles dans la chambre de Kouroslépov ?), qui elle-même débouche sur une histoire de corruption (gouverneur vénal), témoignant d'une époque nouvelle : l'avènement du capitalisme symbolisé par Khlynov, l'entrepreneur qui achète tout et tout le monde. A toutes ce