Quand la pièce d'Allan Bennett (1) fut créée à Londres en 1992, le groupe rock homonyme avait éclaté depuis quatre ans, ce qui n'importe pas, le sujet de l'une n'ayant rien à voir avec l'autre. Sauf sur un point : David Byrne et ses amis avaient choisi, en 1975, de se baptiser «têtes parlantes» après avoir lu un magazine de télévision du même nom qui désignait, dans le métier, des plans fixes et rapprochés de présentateurs, censés transmettre «uniquement du contenu, et pas d'action».
Golf.Talking Heads, la pièce, offre ça : des plans fixes sur trois femmes de la petite bourgeoisie anglaise, de banlieue, du genre qui votera Thatcher. On les suit l'une après l'autre, pendant deux heures qui en paraissent moins, malgré la chaleur transformant en serre de velours le Théâtre Marigny. La première est une secrétaire célibataire qui, atteinte d'un cancer, passe de la cantine au scanner. Jusqu'au bout, la familiarité condescendante dont elle est victime ne l'empêche pas de dire, à propos de n'importe quoi et à n'importe qui: «On a ri !» La deuxième est une folle de jardinage mariée à un type rêvant de croiser Sean Connery au golf de Marbella. Elle entre chez sa voisine au moment où celle-ci vient de flinguer son mari, sadique qui faisait profiter les voisins des traitements infligés à sa femme ; elle la visite en prison et elles deviennent amies. La troisième vit avec son frère, crétin victime d'une attaque. Son plaisir est de se faire trai