Menu
Libération
Critique

Pas de quartier pour le Temple

Article réservé aux abonnés
Avignon. Relecture plombante de la chute de Jérusalem par Amos Gitaï, sauvée par Jeanne Moreau.
(Christophe Raynaud de Lage / Festival d'Avignon)
publié le 9 juillet 2009 à 6h52
(mis à jour le 9 juillet 2009 à 6h52)

Assise à la table, un manuscrit sous les yeux, face au public, la voix chaude toujours placée, séductrice professionnelle qui commande sans quémander. Il y a soixante-deux ans, Jeanne Moreau participait au premier festival d’Avignon. Elle y est plusieurs fois revenue. Cette année, elle est à la carrière Boulbon et fait le boulot sans trémolo, attentive à bien dire ; on peut fermer les yeux, elle vous embarque où elle veut ; pour la diva vieillissante et la cérémonie des adieux, on repassera.

Elle seule suffirait. Cela durerait une heure. Elle lirait des extraits de la Guerre des juifs de Flavius Josèphe. Il y aurait un ou deux projecteurs, on s'inquiéterait que le vent ne fasse pas s'envoler les pages. Elle lirait des phrases comme : «C'est pourquoi moi, Josèphe, fils de Matthias, hébreu de race, natif de Jérusalem, prêtre, ayant moi-même fait la guerre contre les Romains dans un premier temps et, par la suite, ayant été obligé de suivre les opérations, j'ai décidé d'exposer les événements…»

Défaite. On la suivrait du siège de Yodfat, où Flavius Josèphe est fait prisonnier par les Romains, jusqu'au suicide collectif des derniers retranchés dans la citadelle de Massada. Entre-temps, il y aurait les combats et la chute de Jérusalem, l'incendie du Temple. Comment les juifs, il y a près de deux mille ans, ont perdu Israël : c'est le récit tragique que Josèphe l'historien a laissé pour la postérité et que le cinéaste israélien Amos Gitaï entend fa