Turin, décembre 2007 : sept ouvriers meurent brûlés vifs dans l'incendie d'une usine vétuste du groupe ThyssenKrupp. De cet accident du travail, Pippo Delbono fait le point de départ de la Menzogna («le mensonge»), son nouveau spectacle.
Sur scène, côté cour, les armoires métalliques d’un vestiaire sont l’ancrage d’un ballet silencieux : solitaires, les ouvriers entrent dans la pièce, se déshabillent, enfilent une combinaison de travail ; parfois, c’est l’inverse, selon qu’ils prennent ou quittent leur service ; les gestes quotidiens sont dépouillés, à bonne distance du réalisme et de l’esthétisme. Au milieu, tout au fond du plateau, l’encadrement d’une porte ouvre sur l’obscurité ; sas pour le néant.
Vestiaire. La séquence dure un quart d'heure et se termine par un ultime passage au vestiaire ; l'ouvrier ressorti du gouffre ôte son bleu, enfile un beau costume, attrape un bouquet de fleurs au fond du casier, et va s'allonger dans un cercueil.
La Menzogna pourrait presque s'en tenir à ce concentré chorégraphié de ce que Pippo Delbono, qui sait ce qu'il doit à Pina Bausch, peut offrir de meilleur. Le metteur en scène italien préfère employer l'heure qui suit à surcharger la barque de l'enfer. Il commence par effleurer la piste du théâtre documentaire via la projection d'un film d'autopromotion de la compagnie ThyssenKrupp, dont les accents enthousiastes prennent forcément dans ce contexte une dimension grinçante ; il enchaîne sur une deuxième v