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Libération
Critique

Un «Combat» poids moyen

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Théâtre. Du Koltès peu nuancé.
publié le 3 juin 2010 à 0h00

Dans une lettre à Hubert Gignoux de 1978, Bernard-Marie Koltès raconte ses premières impressions d'Afrique (1). Il a été rendre visite à des amis sur un chantier au Nigeria. Dans son sac, parmi d'autres ouvrages, Au-dessous du volcan de Malcolm Lowry : «Le livre tout à coup me semblait une effrayante machine de mort entre mes doigts […]. Cette fois, je ressentais l'incroyable dureté, - j'aurais voulu que s'y mêle de la pitié, cette pitié qui fait, des romans les plus noirs de Dostoïevski, quelque chose de brûlant, et qui donne envie de vivre -, mais je trouvais cette fois que la pitié était par Lowry rangée avec tout cela qui est condamné à être broyé et détruit, et jeté dans le ravin, - avec un chien paria par-dessus.»

Quatre ans plus tard, quand il écrit Combat de nègre et de chiens, le souvenir du Nigeria est indissociable de cette relecture de Lowry, «avec les appels incessants, par radio, d'un chantier à l'autre, et le brouillard rouge soulevé par le ventilateur et qui décolore tout». De fait, Combat… est une pièce sous influence littéraire, celle de Lowry, explicite jusqu'à l'image finale du chien mort jeté sur le cadavre, et celles, tout aussi claires, de Céline (Voyage au bout de la nuit), Conrad (Au cœur des ténèbres), et bien sûr Genet (les Nègres). Pour Koltès, l'Afrique est aussi un voyage en littérature, une descente aux enfers (nuit d'angoisse, d'alcool, de violence et de mort) aux stations