Menu
Libération
Critique

Tchekhov, le toboggan social

Article réservé aux abonnés
Théâtre . A Nanterre, Frank Castorf et la Volksbühne mixent «les Trois Sœurs» et «les Paysans» de l’auteur russe. Une allégorie acerbe de l’ex-RDA, voire plus.
publié le 3 décembre 2010 à 0h00

Le drapeau rouge flotte toujours sur la Volksbühne, vingt et un ans après la chute du Mur. «Vorsicht, Volksbühne !» (Attention, Volksbühne !), est-il inscrit sur la bannière, comme on mettrait en garde contre un chien méchant.

Le théâtre que dirige Frank Castorf n'est pas un bunker de l'idéologie communiste, ni un conservatoire de la nostalgie de l'ex-RDA. Mais dans une ville qui a effacé la plupart des traces de sa division (ou les a recyclées en folklore pour touristes), la «Scène du peuple», plantée sur un côté de la Rosa-Luxemburg-Platz, qui arbore, en plus du drapeau rouge, l'inscription «Ost» (Est) sur son fronton, revendique une double fonction historique du théâtre, à la fois lieu de mémoire et de morsure.

Roue. Depuis 1992, année où il en a pris la direction, Castorf est parvenu à faire du lieu un pôle majeur de dérangement et de recherche. Même si ces dernières années la Volksbühne et son directeur n'ont pas échappé à une certaine usure, perceptible dans des productions où le maître donnait l'impression de tourner en rond (la roue étant par ailleurs l'emblème de la maison), y compris dans l'utilisation de la vidéo, dont il fut un brillant pionnier…

Son adaptation des Trois Sœurs de Tchekhov renoue avec la puissance et la capacité à brasser l'histoire et le présent. Sans trop se disperser, même si le metteur en scène s'amuse à compliquer la donne, en intégrant dans la pièce une nouvelle de Tchekhov, les Paysans. Où N