On voudrait écrire naïvement : «La vidéo, maladie du théâtre.» Mais entre la diminution des subventions, la congestion des formations professionnelles, le cloisonnement des genres et des publics, le renfermement des scènes «publiques» sur leur propre réseau, les effets de mode qui croient faire école, on sait que le théâtre ne souffre pas d’une maladie unique. Par ailleurs, il serait hypocrite de blâmer par principe l’image projetée qui, depuis Piscator et Brecht déjà, possède une si grande puissance visuelle de déconstruction-reconstruction de l’espace et du temps scéniques. Pourtant, comment expliquer son mésemploi symptomatique dans le théâtre contemporain, dont deux échantillons nous ont été présentés à Avignon ?
L'utilisation de la vidéo par Guy Cassiers dans Sang & Roses, double portrait de Jeanne d'Arc et de Gilles de Rais, consiste à filmer des acteurs sur fond d'images touristiques de la cité des Papes projetées derrière eux sur deux écrans latéraux. La scène n'existe plus que comme plateau de tournage, avec deux couloirs exigus matérialisés par des marquages au sol, lourdement ostentatoires. On nous fait vite comprendre qu'il n'y a là rien à regarder (surtout si l'on est assis sur les côtés), les acteurs jouant pour les caméras, parlant pour les micros, et l'espace si étrange (et pertinent par rapport au sujet) de la cour d'honneur du palais des Papes étant gommé autant que possible, réduit à l'aplat de l'image projetée. La vidéo, qui confine le jeu mêm