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Critique

«L’Ecole» des flammes

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théâtre . L’Arnolphe de Molière transfiguré par une passion dévorante, dans une mise en scène de Jacques Lassalle à la Comédie-Française.
publié le 7 décembre 2011 à 0h00

Avec la démagogie propre à ceux qui mettent les rieurs du bon côté, Molière voulait que «le parterre» s'amuse à l'Ecole des femmes et, accessoirement, des prudes et hypocrites que choquaient certaines répliques. Il voulait que le «bon sens» trouve Arnolphe ridicule plus encore qu'odieux. Sa pièce était pour lui une comédie, rien de plus et rien de moins, c'est ainsi qu'il la fait défendre dans la Critique de l'Ecole des femmes en l'opposant aux facilités pompeuses de la tragédie : «Je trouve qu'il est bien plus aisé de se guinder sur de grands sentiments, de braver en vers la Fortune, accuser les Destins, et dire des injures aux Dieux, que d'entrer comme il faut dans le ridicule des hommes, et de rendre agréablement sur le Théâtre les défauts de tout le monde […]. Et c'est une étrange entreprise que celle de faire rire les honnêtes gens.» Mais l'auteur d'un chef-d'œuvre n'en est qu'un lecteur de plus. Ses interprétations n'engagent que lui.

On rit peu dans la mise en scène si profonde et émouvante de Jacques Lassalle, sa quatrième de la pièce. Cette érosion du rire, qui nous met irrésistiblement du côté d’Arnolphe, l’idéologue à l’angoisse méchante, a justement pour mérite de ne pas faire de nous des «honnêtes hommes», ces canailles vernies et satisfaites, venues se divertir au spectacle des vices des autres. Arnolphe, l’homme qui achète Agnès enfant et l’élève sous vide, l’individu qui l’aime comme un dieu tout-puissant et un amant impuiss