Quel diable a piqué le cardinal André Vingt-Trois ? En appelant ce soir à une veillée de prière à Notre-Dame «pour protester contre une pièce qui insulte la personne du Christ en croix», l'archevêque de Paris semble légitimer la mobilisation du groupuscule d'extrême droite Civitas qui entend perturber, y compris par la violence, les représentations de Golgota Picnic, la pièce de Rodrigo Garcia jouée à partir de ce soir au Théâtre du Rond-Point dans le cadre du festival d'Automne. Une pièce que le prélat n'a pas vue, et son entourage visiblement non plus.
Hommage. Ce serait bien entendu le droit le plus absolu de l'auteur et metteur en scène hispano-argentin de présenter un spectacle «christianophobe» ou blasphématoire. Mais ce n'est même pas le cas. Prétendre que Golgota Picnic«insulte le Christ» tient, au minimum, du malentendu. Le spectacle présenté le mois de dernier au théâtre Garonne de Toulouse (Libération du 15 novembre) n'est pas un brûlot antireligieux, même quand il pointe la violence qui se rattache à l'iconographie chrétienne, ou que ses cinq acteurs réinterprètent certains tableaux de la Passion, entre douleur, grotesque et désarroi. Moraliste maniant paradoxe, imprécation et humour, Garcia s'amuse - et s'inquiète - du genre humain, et tire sur d'innombrables cibles. Quant à la dernière partie, entièrement consacrée à l'interprétation des Sept Dernières Paroles du Christ de Haydn par