Metteur en scène, à la tête du Théâtre national de Strasbourg dans les années 70, Jean-Pierre Vincent a aussi dirigé les Amandiers de Nanterre, de 1990 à 2001. Entre les deux, de 1983 à 1986, il a été administrateur général de la Comédie-Française, un poste qu'il a quitté de lui-même et qu'il qualifie encore aujourd'hui de «plus dangereux de France, avec Matignon». Auteur d'un rapport sur l'intermittence, il est l'une des voix les plus respectées sur la scène théâtrale hexagonale.
Le conflit actuel marque-t-il, selon vous, un tournant dans l’histoire de la Comédie-Française ?
Il témoigne d’une longue évolution historique et de changements importants. Pensez qu’il y a quarante ans existaient encore un ascenseur réservé aux sociétaires et un second pour le reste du personnel. L’organisation était pyramidale, comme à l’opéra, avec l’acteur - le sociétaire - tout en haut de l’échelle. Les choses ont beaucoup évolué depuis, et l’importance des domaines techniques s’est affirmée. Il y a un demi-siècle, on jouait encore avec des toiles peintes, et ce n’était pas très grave si les machinistes étaient bourrés. Depuis, la maison s’est ouverte aux plus grands metteurs en scène et à la modernité scénique. Le professionnalisme des équipes est remarquable.
Est-ce la fin de la toute-puissance des sociétaires ?
On peut se passer de tout le monde au théâtre, sauf des acteurs. Sans eux, nous ne serions rien. L'organisation hiérarchique ne vient pas de Molière. Elle s'est construite au XVIIIe et surtout au XIXe siècle, symbole de l'embourgeoisement de la maison. La demande de rééquilibrage de la part des autres m