Menu
Libération
Critique

«Arturo Ui», baudruche nazie

Article réservé aux abonnés
Théâtre . Au Festival d’automne, la pièce de Brecht montée par Heiner Müller avec le Berliner Ensemble.
publié le 25 septembre 2012 à 21h26

Quand à la fin, pour rire, il esquisse un salut nazi à l’attention des spectateurs, on s’étonnerait à peine si certains dans la salle l’imitaient. Par réflexe pavlovien bien sûr… Le pouvoir de persuasion de Martin Wuttke, l’acteur incarnant Arturo Ui, le gangster-apprenti dictateur héros de la pièce de Brecht, passe d’abord par la gestuelle. Celle d’un clown ridicule, petit bonhomme secoué de tics, si absurdement monstrueux qu’il en serait touchant.

Pantins. Contorsionniste aux membres en caoutchouc, capable de transformer son corps en croix gammée, Wuttke, qui interprétait Hitler dans Inglourious Basterds, de Tarantino, est sur scène une baudruche vociférante qui fait rire, une poupée gonflable à voix de fausset entourée de pantins. Dix-sept ans après sa création en 1995 à Berlin, la Résistible Ascension d'Arturo Ui dans la mise en scène de Heiner Müller arrive à Paris. Le spectacle figure toujours au répertoire du Berliner Ensemble, c'est toujours Wuttke qui tient le rôle majeur, et cela reste sacrément efficace. Quelques mois avant sa mort, Heiner Müller avait accepté de signer la mise en scène. Les témoignages de l'époque évoquent un climat de répétitions morose, avec un metteur en scène épuisé, et une troupe cultivant la nostalgie de la précédente mise en scène d'Arturo Ui, réalisée en 1959 par Peter Palitzsch, avec Ekkehard Schall dans le rôle-titre. Le jeune Wuttke, 33 ans en 1995 et pur enfant de la RFA, débarquait d'autant