Cela tient de la mine abandonnée autant que de la ville fantôme. Dans la carrière de Boulbon, Dieudonné Niangouna et son scénographe, Patrick Janvier, ont conçu un immense décor de rouille et de poussière, un pays des morts où la mare aux crocodiles fait office de point d'eau ; un fond de cratère où serait tombée la Lune, où pleuvent les cadavres et où cohabitent une chèvre, des dieux anciens, des voyageurs égarés et des âmes errantes. Un décor à la hauteur d'un projet monstre, répété notamment à Brazzaville ( Libération de vendredi), près de cinq heures de spectacle pour une épopée qui pétrit une infinité de références, brasse les mythologies (grecques, africaines, contemporaines), voyage dans la mémoire, les rêves et les cauchemars de son auteur, lui-même hanté par la guerre civile qui a ravagé le Congo Brazzaville, son pays. Impossible de ne pas saluer l'ambition et la déraison d'une fresque où, parmi de multiples échos, on pourra entendre une réminiscence du théâtre de Didier-Georges Gabily, disparu en 1996, lui aussi grand pétrisseur de mythes.
Le pays des morts selon Niangouna est une communauté villageoise obéissant à des règles complexes, dominée par une figure féminine, «la mastodonte», et peuplée d'habitants mélancoliques, blessés, hagards, lucides, sentencieux, têtus, raisonneurs, comme autant de figures familières et exagérées. Un sé