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Théâtre

«Gros-Câlin», tendre étreinte

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Le premier roman d’Ajar-Gary incarné par Jean-Quentin Châtelain, entre python et lamantin.
Jean-Quentin Châtelain dans «Gros-Câlin». (Photo Dunnara Meas)
publié le 28 novembre 2013 à 17h06

En 1974, Romain Gary publie à 60 ans son premier roman sous le pseudonyme d'Emile Ajar : Gros-Câlin (1). C'est le nom que donne un modeste employé célibataire au python qu'il a rapporté d'Afrique, où il était parti en voyage organisé. L'employé fantasme ses rapports avec une collègue guyanaise, qui s'appelle Melle Dreyfus en hommage au capitaine du même nom, et il va aux «bonnes putes».

Le livre débute au Jardin d'acclimatation, comme une nouvelle de Cortazar et, comme elle, on ne peut l'imaginer sans le Paris de ces années-là, celui des Trente Glorieuses et des hommes de bureau à l'imagination rentrée. Sur le racisme et les prostituées, comme sur à peu près tout ce dans quoi il serpente, Gros-Câlin a tout ce qui manque généralement à l'actualité : la subtilité.

Mue. Le python apporte à son propriétaire quelques soucis avec ses voisins, mais surtout un réconfort physique et sentimental. Il ne s'en séparera que lorsqu'il se prendra pour lui : c'est une forme comme une autre de mue et une recherche éperdue d'autonomie. L'employé nous dit sur un ton de cloche fêlée : «Je suis rentré chez moi, je me suis couché et j'ai regardé le plafond. J'avais tellement besoin d'une étreinte amicale que j'ai failli me pendre.» Il ajoute : «Heureusement, Gros-Câlin avait froid, j'avais astucieusement fermé le chauffage exprès pour ça et il est venu m'envelopper en ronronnant de plaisir.» Bien entendu, un p