C’est le désert en reflets de l’amour et c’est Silvia, jeune villageoise manipulée, ingénue pas encore libertine, qui donne sans y penser la morale de cette histoire amorale : aucun couple n’est assuré d’être plus fort que la situation sociale et affective dans laquelle il est plongé. Le couple est une fiction ; il ne survit qu’en résistant à d’autres fictions. Anne Kessler met en scène le frottement sensuel entre ces fictions avec une inventivité joyeuse, vive, merveilleusement désordonnée par ses excès. La jeunesse des personnages est portée par celle des acteurs. C’est le jeu de l’amour et des regards.
L’action a lieu au foyer des artistes de la Comédie-Française. Il y a un grand miroir avec sa barre de danse, des tas d’éléments de décor, une ouverture factice sur les toits voisins de Paris. A mesure que la pièce avance, les dates de répétitions et de filage apparaissent : les personnages ne cessent jamais d’être des acteurs. Le cœur est un abîme de légèreté mis en abyme. C’est à la fois inutile et plaisant. Une guitare brésilienne caresse les corps et les situations, comme une brise tiède. Un concerto pour piano de Mozart souffle sur des sentiments qui naissent, qui s’éteignent. L’usage de la musique est discrètement et ironiquement hollywoodien. Les femmes portent des chapeaux nains.
Le cœur du spectateur flotte dans une coupe de champagne, fraîche, légèrement acide. Son plaisir est le titre d'une célèbre nouvelle de Vivant-Denon : Point de lendemain. A la fin, u