PAR DOMINIQUE WOLTON,
Directeur de recherches au CNRS Se voir pour s'entendre - «Pas besoin de se voir pour s'entendre», proclame une publicité depuis la découverte du téléphone, il n'est plus nécessaire de se rencontrer pour se parler. Les hommes peuvent parler à distance, et même, avec la télévision, se voir à distance. On mesure encore mal les conséquences de cette rupture radicale dans la longue histoire de la communication. Aujourd'hui, grâce aux techniques chacun peut, à tout moment, dire n'importe quoi, n'importe où, n'importe quand. Cela ouvre des applications professionnelles, comme par exemple des services bancaires, ou autres, ouverts vingt-quatre heures sur vingt-quatre par l'intermédiaire du téléphone et de la télématique. D'ailleurs, comme on n'arrête pas le progrès, une autre banque propose de déclencher un appel téléphonique, automatique, chez vous, trois fois de suite, dès que votre compte au cas où vous ne le sachiez pas est à découvert. La course aux applications en tout genre est donc ouverte. En réalité, il n'y a plus d'heures de bureau, plus d'heures «de fermeture». Tout est «ouvert». Voilà donc une communication totale, libérée de l'espace et du temps, ces deux frontières indépassables de toute expérience humaine.
Et là, tout devient intéressant. Passé la découverte d'une liberté nouvelle, celle de pouvoir communiquer sans frontières, sans cadres et sans contraintes, sur quoi bute-t-on? Sur les difficultés non pas de la communication, mais de la f