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Libération

Jospin et la nouvelle culture politique de la gauche

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publié le 4 mai 1995 à 5h18

Jospin et la nouvelle culture

politique de la gauche PAR PIERRE ROSANVALLON Vingt-trois pour cent: personne ne peut se vanter d'avoir prévu le score de Lionel Jospin. On peut certes d'abord souligner que ce chiffre traduit la persistance d'un clivage traditionnel gauche/droite, même s'il ne constitue plus le seul axe structurant de la vie politique. Tout se passe en effet comme s'il y avait deux univers politiques qui se superposaient désormais en France. Celui de la tradition et de l'histoire d'un côté, traçant une ligne de partage faite d'images anciennes, représentant une sorte de mémoire sédimentaire des affrontements. Celui d'un espace électoral beaucoup plus volatil de l'autre, privilégiant les déceptions et les rancoeurs. Le score de Jospin montre qu'il n'est pas seulement le candidat de la tradition. Il s'est aussi joué quelque chose d'autre autour de lui. Ce n'est ni un charisme personnel ni un capital historique de légitimité qui lui a permis de remonter la pente. On peut je crois formuler une toute autre hypothèse pour expliquer son résultat: à sa façon discrète et modeste, mais solide et crédible, Jospin a commencé à exprimer la formule d'une nouvelle culture politique pour la gauche.

Pour bien comprendre les éléments de cette révolution discrète, on peut rappeler très brièvement les termes de l'impasse politique et intellectuelle dans laquelle se trouvaient les socialistes à la fin du second septennat de François Mitterrand. La gauche avait en partie renoncé à son