Pour la première fois dans l'histoire de la Méditerranée, la
Conférence de Barcelone réunissait, en novembre 1995, des nations à l'exception de la Libye, exclue qui n'avaient cessé de s'opposer. Le souvenir des fractures produites ou ravivées par la guerre du Golfe, les «menaces supposées» (montée de l'intégrisme, flux migratoires incontrôlés, instabilité politique, prolifération des armements, destruction de l'environnement, etc.), la recomposition géopolitique à l'est de l'Europe, les effets dissolvants de la mondialisation de l'économie, tous ces éléments exigeaient une réorientation stratégique de l'Europe en direction du Sud.
Le document contresigné par les Etats présents à Barcelone constitue désormais le cadre de référence de la coopération euro-méditerranéenne. Il est évidemment trop tôt pour dresser un bilan de la stratégie proposée. Mais force est de constater que le processus de démocratisation au Sud n'a pas beaucoup avancé: le seul pays qui ait joué la carte de la démocratie (la Turquie) est aujourd'hui sous l'empire d'une coalition laïco-religieuse étroitement surveillée par l'armée. Les sociétés «civiles», quant à elles, sont soumises à une dialectique conflictuelle difficilement maîtrisable où la contestation politico-religieuse des couches populaires fait face à l'autoritarisme «moderniste» des groupes dirigeants. En dépit des efforts réels des responsables de la politique méditerranéenne, les négociations pour la mise en place de la zone de libre-échange