Le fond du problème n'est pas tant celui de la dissolution de
l'Assemblée nationale que celui de la dissolution, de l'autodissolution du peuple, qui a perdu toute illusion sur la classe politique, qui a perdu même le goût d'être représenté et ne continue d'aller voter, selon une vieille habitude, que pour se décharger de toute responsabilité. Mais, s'il y a longtemps que le peuple en use ainsi, c'est la première fois que la classe politique elle-même est prise de l'envie de se débarrasser du pouvoir. Or, que les représentés (le peuple) fassent défaut, c'est déjà grave, mais que les représentants eux-mêmes se défaussent, alors c'est l'exercice même du pouvoir qui est en cause.
On voit ainsi un Président dissoudre sa propre majorité absolue pour refiler le pouvoir à une gauche qui ne s'attendait visiblement pas à ce cadeau empoisonné, mais qui est bien forcée de le prendre. Si Chirac ne l'a pas expressément voulu (le saura-t-on jamais?), il a manifestement tout fait pour cela comme téléguidé depuis deux ans par cet échec «improvisé». En fait, sa décision de dissoudre est un faux acte manqué, et la victoire de la gauche est un faux acte réussi. Dans cette course-poursuite pour se débarrasser du pouvoir, Chirac a parfaitement réussi: il s'est délesté d'une majorité encombrante et d'une chambre «introuvable» (tout comme Mitterrand s'était débarrassé du PS après avoir réglé son compte au PC). Rien de tel qu'une cohabitation pour faire faire le sale travail social à la gauche (cel