Responsables et coupables. C'est sous ces deux charges implicites
que la commission d'instruction a décidé de renvoyer devant la Cour de justice de la République Laurent Fabius, Georgina Dufoix et Edmond Hervé, pour homicide involontaire et atteinte à l'intégrité des personnes dont les plaintes ont été reçues. Responsables politiquement, coupables pénalement. A quelques mois de l'an 2000, la France est le seul pays, dans un monde universellement touché par la catastrophe du sida, à mettre en oeuvre un tel procès. Il paraît justifié aux yeux de l'opinion pour deux raisons légitimes. La France est la nation européenne la plus atteinte par la surcontamination des transfusés. Et on ne peut pas prêcher à l'étranger la suprématie des droits de l'homme sur le droit de l'Etat, avec la création de la Cour pénale internationale, et continuer de défendre, chez nous, l'irresponsabilité des hommes politiques. Si la loi doit être égale pour tous, personne ne peut contester le bien-fondé d'une enquête sur l'action des personnalités qui avaient la charge de la santé publique.
Le malheur est que cette enquête a été négligée par la commission d'instruction. La question qui commande en effet la charge de la preuve de la culpabilité éventuelle n'a pas été posée. Or elle est simple: «Qui savait quoi?» Aujourd'hui, nous savons que le sida est une catastrophe sanitaire mondiale, une pandémie qui a déjà fait plus de 20 millions de morts. Aujourd'hui, nous savons que l'agent causal du sida est le viru