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Libération
TRIBUNE

Parité. Demander à inscrire l'égalité dans la Constitution, c'est refonder la République. A l'image d'une colombe à deux têtes: totalement indivisible. N'ayons pas peur de 288 députées.

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par Agnès ROSENSTIEHL
publié le 16 février 1999 à 23h46

Danièle Sallenave, Evelyne Pisier, Elisabeth Roudinesco" elles se

mordront amèrement les doigts un soir. Les lire m'a serré le coeur au gré de la vieille angoisse: effacer", parler mâle", faire sa neutre" Un jour, généreux ou contraint qu'importe, le colonisateur desserre la poigne et lâche le colonisé. Est-on fondé, ce jour-là, de demander au colonisé de posséder des richesses comparables à celles que le colonisateur a amassées grâce au colonisé durant des millénaires? Rappelons la pensée misogyne et goguenarde: les grands philosophes, penseurs, artistes, etc., sont tous des hommes, c'est la preuve de l'absence de génie féminin. Et Sallenave cherchant des armes contre la parité: «Programme hommes: Platon, Descartes, Spinoza, Kierkegaard, Sartre. Programme femmes: Politique des sexes de Sylviane Agacinski.» On a bien entendu: la pléiade de génies (elle a même généreusement omis d'en citer quelques-uns, on le sent vaguement), face à la pauvre, seule, et débile" O la chanson trop connue" C'est toujours à mourir de rire, d'ailleurs, et ça rappelle le dessin si juste dans sa cruauté commentant l'entrée de Yourcenar à l'Académie française. On y voyait les toilettes de l'Académie avec deux sections pudiquement précisées: «Hommes»- «Yourcenar»" C'est vrai, il y a peu de temps encore, chacune pouffait à l'idée de voir des femmes préférées à des hommes hors des raisons de compétences: vision surréaliste d'un hémicycle habité par 288 «compétents» face à 288 «niaises», nécessairement n