Menu
Libération
TRIBUNE

Les mots habillent la pensée, et toutes les entreprises totalitaires ont utilisé le travestissement du langage comme levier. Debray ou le révisionnisme au présent.

Article réservé aux abonnés
par Didier Daeninckx, Frédéric H. FAJARDIE et Valère STARASELSKI
publié le 18 mai 1999 à 1h04

Après avoir lu votre point de vue sur la guerre du Kosovo (le Monde

du 13 mai 1999), nous avons peur, Régis Debray, que vous n'entraîniez trop de gens de bonne foi dans le sillage de votre «nationalisme républicain». Par un terrible effet de miroir, votre dénégation de faits avérés qui constituent la tragédie des Balkans réfléchit une autre dénégation de «nationaux» se situant à l'exact opposé de la position que vous affirmez.

Nous n'avons pas le souvenir de vous avoir entendu protester lorsque les premières bombes ont frappé Belgrade, ni vous avoir vu dans la manifestation où nous nous trouvions pour condamner, de manière indissociable, la purification ethnique mise en oeuvre par Milosevic et les raids aériens de l'Otan. Nous pensions que cette guerre était une fausse solution aux problèmes de l'ex-Yougoslavie et que ses conséquences en seraient désastreuses. A vous lire, il nous semble que notre première exigence, la fin de la purification ethnique, vous pose problème: vous ne décelez, au Kosovo, au début, qu'un «déchaînement de représailles», «de la part d'éléments dits "incontrôlés, avec la complicité probable de la police locale», et ensuite «l'exode" mais à plus petite échelle», nous assurant même que, pour les Albanais du Kosovo, «c'est l'occasion d'émigrer en Suisse, en Allemagne ou ailleurs». Vous pratiquez là le révisionnisme au présent.

«Aurais-je trop écouté les gens d'en face?», demandez-vous ingénument après avoir cité l'ultranationaliste Vuk Draskovic. Et d'assén