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Libération
TRIBUNE

Les Américains ne seraient pas en train de bombarder Belgrade si elle était à 100 km de New York et qu'ils pouvaient craindre une risposte. Le privilège américain.

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par Paul WEST
publié le 26 mai 1999 à 1h11

Il y a quelques années, un critique mal informé, voulant rendre

compte de mon roman sur le viol de Nankin par les Japonais en 1937, me reprochait gentiment de n'avoir pas fait directement l'expérience des bombardements. Or j'avais parfaitement vécu des bombardements, pendant quatre ans, quand les nazis avaient essayé de rayer de la carte un certain nombre de villes industrielles britanniques. Je n'oublierai jamais le spectacle des quatre personnes qui composaient notre famille se jetant sous la table de la salle à manger, puis, devenus plus avisés, se hâtant vers la cave avant l'arrivée des bombardiers. Je dormais à côté de ma soeur sur l'énorme carton dans lequel on nous avait livré la table de billard. Nous avons eu de la chance, bien qu'une bombe soit tombée sur notre village, situé à une dizaine de kilomètres de la ville de Sheffield. Un jour, me rendant à l'école en bicyclette (car la vie continuait, bien entendu), comme je le faisais chaque matin, je vis, au nord, le soleil se lever à un endroit où il n'aurait pas dû être. C'était Sheffield qui brûlait après le bombardement de la nuit. La fureur des attaques aériennes ne m'était donc pas inconnue, et j'en ai gardé un souvenir très prégnant, toujours ravivé quand des bombes commencent à tomber quelque part.

Nous avons appris non seulement à nous mettre correctement à l'abri mais comment une ville parvient à s'organiser dans ce genre de circonstances. Alors que les préparatifs en vue de l'invasion de l'Angleterre, dénommé