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Libération

Le mausolée souverainiste.

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publié le 12 novembre 1999 à 1h55

En moins de cinquante ans (la déclaration de Robert Schuman,

fondatrice de l'Europe, date du 9 mai 1950), le sentiment national français s'est métamorphosé plus vite qu'en plusieurs siècles. Il n'a rien perdu de sa vivacité ou de sa vigueur. Il reste prompt à s'enflammer, qu'il s'agisse d'une prouesse sportive, d'une polémique culturelle ou d'une guerre commerciale. Les formes, le contenu même du patriotisme ont pourtant évolué. Si le sentiment national s'impose toujours aisément à toutes les solidarités (régionales, locales, européennes, religieuses, sociales, culturelles), il apparaît aujourd'hui plus ouvert, plus constructif, plus confiant que jadis. Avec la décolonisation, il a abandonné toute dimension impériale ou dominatrice vis-à-vis des pays tiers. Avec la fin de la guerre froide, il a perdu toute connotation belliqueuse, instinctivement antagoniste, inévitablement manichéenne. Avec la naissance de l'Europe, il a substitué tout un réseau d'alliances et d'amitiés, d'intérêts communs aux rapports de force et à l'univers de menaces ou de rivalités avec les puissances voisines qui gouvernaient les mentalités depuis des centaines d'années. Le patriotisme français ne décline pas, il mûrit.

C'est ce que les souverainistes refusent de comprendre et ne parviennent même pas à envisager. Pour eux, le monde reste une affreuse tragédie dont la France ne peut être que la victime et la cible. Dans leur représentation de l'univers, la mondialisation nous broie, l'Europe nous efface