Lundi.
La loi et la justice
Un ancien Premier ministre recommande, ce matin, sur les ondes, la lecture de Montesquieu: il rapporte même une formule du philosophe de De l'esprit des lois selon laquelle on ne doit pas obéir à la loi parce qu'elle est la loi mais seulement parce qu'elle est juste et inspirée par la justice.
Nous ne lirons ou n'entendrons rarement argument aussi habile et contestable, encore que tout le monde (ou presque) opine! Cette remarque affaiblit la loi et la soumet à plus important qu'elle.
Mais la justice, que nous dit-elle? Rien n'est aussi vague et indéterminé qu'elle. Chacun peut d'ailleurs la revendiquer pour soi. La loi seule est précise, elle a été discutée et avalisée (par ceux qui nous représentent). On sait à quoi s'en tenir. La justice se révèle sans contenu: nous nous méfions de ces «grands mots» que l'on brandit, surtout lorsque telle ou telle juridiction (regardée alors comme arbitraire) a sanctionné. Le condamné prend une revanche fictive (ce n'est pas juste). Assurément, le tribunal peut, çà et là, se tromper, mais l'évocation de la justice n'en abuse pas moins ceux qui l'évoquent.
Le défenseur de cette justice nous objectera que le châtiment est calqué sur l'importance de la faute. La balance y pourvoit. Beccaria a même fixé l'échelle des «délits et des peines qui leur correspondent». Rien n'est plus faux (l'oeil pour oeil, dent pour dent n'exprime que la vengeance; et si l'un est une faute, l'autre la répé