La justice est une denrée perméable aux grands ordres politiques et
la mondialisation de l'économie qui s'affiche ouvertement, presque machinalement, correspond aussi à une mondialisation de l'ordre public avec l'instauration d'une pensée unique sécuritaire. On dit que le peuple a besoin de trouver des responsables aux évolutions tentaculaires de la délinquance dite de voie publique, essentiel objet de nos inquiétudes et donc de notre réflexion en terme de politique pénale.
La justice et ses juges suivent cette voie tracée sans que soit dénoncée l'instrumentalisation dont le corps judiciaire est inexorablement l'objet. C'est ainsi qu'on assiste sans mot dire à la «judiciarisation» accrue des actes d'incivilité tout en criminalisant davantage la misère; la justice abandonne ainsi l'une de ses missions essentielles qui est celle d'appliquer la loi tout en veillant à ce que ne soit pas rompue l'égalité républicaine entre les justiciables.
Force est de constater qu'on est loin du compte à la lumière du mode de traitement des affaires dites sensibles et les juges doivent se montrer persévérants et courageux pour résister à cette régression de leurs fonctions alors que leurs carrières dépendent du politique.
A ce constat vient s'ajouter l'incapacité récurrente des politiques à régler le chômage et la précarité, ce qui les conduit à chercher ailleurs la cause des maux dont souffre notre société; ici ou là, c'est les étrangers, les jeunes ou la drogue. La philosophie du bouc émissaire