La lumière du bureau de Joseph Staline était allumée de jour comme
de nuit, laissant croire que le «petit père des peuples» veillait en permanence aux destinées révolutionnaires du pays. Un demi-siècle plus tard, la politique reste affaire de symboles, et la présence physique, même passive, des gouvernants continue d'exercer une fascination ambiguë sur l'opinion publique et les médias. Dominique Voynet, à laquelle on a reproché un déplacement officiel, au soleil qui plus est, au lieu de faire immédiatement la tournée des côtes pas encore souillées, vient d'en faire les frais.
Avant elle, d'autres ministres furent critiqués pour avoir brillé par leur absence, comme si leur seule faculté de se projeter sur les lieux d'un événement national suffisait à en modifier le cours. Sur un autre registre, Lionel Jospin avait tenté d'expliquer l'an dernier, au sujet des restructurations prévues chez Michelin, que le pouvoir ne pouvait pas tout. Il avait alors déclenché une levée de boucliers transgressant le tabou du pouvoir super-capable, renonçant quelque part au don divin qui permettait aux rois de France de guérir des écrouelles.
Paradoxalement, notre démocratie, qui dénonce trop facilement l'isolement, l'irresponsabilité ou l'incompétence de ses élus, prête à leur seule présence des pouvoirs presque surnaturels. Certains, moins doués que Staline, le savent bien et se targuent de ne dormir que quatre heures par nuit, garantissant à l'électeur un minimum de sommeil pour un maximum de pré