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Libération
Critique

Livres. La prophétie de J.-F. Kahn. La révolution entrera sans frapper. «De la révolution», Jean-François Kahn, Flammarion, 240 pp., 110 F.

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publié le 4 janvier 2000 à 22h09

Personne ne croit plus à la révolution? Elle est donc pour demain!

Autour de ce paradoxe, Jean-François Kahn a écrit un petit livre joyeusement stimulant. Le directeur de Marianne ne recule pas devant la prophétie. «N'en doutons pas: il y aura une révolution, énorme, globale, planétaire», proclame-t-il. L'auteur devine le sourire du lecteur accablé par le triomphe mondial du capitalisme et le ralliement de tant de «socialistes» au libéralisme économique. Mais son art consommé du contre-pied balaie toutes les objections.

Un: les révolutions éclatent toujours lorsqu'elles sont réputées impossibles. C'est a posteriori qu'un climat est jugé «pré-révolutionnaire». Deux: ce ne sont pas les révolutionnaires patentés qui déclenchent les révolutions. Ces énergumènes «n'ont jamais fait les révolutions, ils les sabotent», affirme Kahn. Trois: le vrai changement n'est pas l'oeuvre d'une classe prédestinée. «Il n'y a pas de véritable révolution qui ne passe par le rassemblement, provisoirement majoritaire, de couches sociales dont aucune n'est majoritaire en soi», analyse-t-il. Quatre: les révolutions ne naissent pas du désir de réaliser une utopie mais, au contraire, d'une simple réaction à l'insupportable présent au nom d'un ordre passé lui-même idéalisé.

A cette aune, la situation actuelle est prometteuse pour le libéral-révolutionnaire Kahn. L'empire du «pancapitalisme» est chaque jour plus sûr de lui. Paré des plumes de la «modernité», il ne devrait pas tarder à commettre l'imprudence