Faisons un effort d'imagination, juste un petit effort
d'imagination. Une nouvelle se répand soudain comme une traînée de poudre dans les salles de rédaction, fait crépiter les téléscripteurs, parcourt le Net à la vitesse de la lumière, les visages se figent dans une expression d'effroi muet, d'incrédulité inquiète, comme si certains contre toute évidence refusaient d'y croire: à la faveur d'un putsch, d'un pronunciamiento, les juges ont pris le pouvoir, et l'exécutif, retranché dans les palais officiels, a rendu les armes" Même si ce scénario catastrophe demeure fiction pure et pour tout dire surréaliste, il semble hanter les esprits de nombre de décideurs publics et de responsables économiques. Peut-être, alors que le Congrès vient juste de faire l'objet d'un report sine die, convient-il que sans la moindre ironie s'agissant d'un sujet aussi sensible pour les libertés publiques l'on permette à un juge d'adresser très humblement une supplique aux bons esprits qui rêvent d'une magistrature enfin responsable.
Parmi les membres de la représentation nationale, certains ont fortement fait entendre cette condition à un vote favorable à la réforme du Conseil supérieur de la magistrature (CSM): il fallait impérativement que l'on propose au Parlement toutes affaires cessantes un texte sur la responsabilité des magistrats, qui devait être le pendant nécessaire de leurs prérogatives renforcées et de leur plus grande indépendance. D'où l'élaboration dans ce contexte d'un avant-projet